Des fibres de bananier tressées sur votre cuir chevelu au Bénin

Monsieur Cossi DJIKOU est membre de la coopérative des producteurs et transformateurs de banane de Grand-Popo. Comptable de profession, il a longtemps œuvré pour la valorisation de ce fruit très convoité dans la zone ouest-africaine. 

Foutou, banane, alloco, grillé avec de l’arachide, bouillie pour accompagner du ndolè et même en chips, la banane plantain est un indispensable des repas africains. 

Savez-vous néanmoins que la banane peut servir à faire des coiffures ???

À quel moment de votre vie, vous décidez de développer la filière à Grand-Popo ? 

Le passage de bureaucrate à homme de terrain a été une simple transition. Il faut dire que j’aime beaucoup m’amuser, j’aime beaucoup rêver et donc je sens que j’ai des compétences que je n’exploitais pas assez. 

J’étais dans une fédération agricole et donc j’ai senti qu’à un moment donné, je pouvais faire autrement les choses. 

Je pouvais me lancer dans une nouvelle activité. 

J’étais avec un ami et nous avions fait le tour de trois cultures. Il y avait le manioc, il y avait le maïs et il y avait la banane. 

Et je lui ai dit, tiens, ça, il n’y a aucune organisation dans le pays par rapport à la banane.  

Moi, j’aime les nouvelles choses, explorer de nouveaux horizons. 

Nous nous sommes donc lancés dans la production de la banane et ceci par la coopérative que nous avons mise sur pied.

Dès que la machine a été lancée, je me suis donnée pour objectif, d’y consacrer tout mon temps. J’ai compris que la banane avait besoin d’être développée et je me suis donnée les moyens pour ma politique.

Dites-nous, pourquoi la banane plantain et pas un autre fruit ?

Pourquoi pas un autre fruit ? Parce que la filière n’est pas très en vogue au Bénin et elle n’est pas encore organisée.  Quand je me lançais, il n’y avait aucune statistique dans les ATDA, par rapport à la banane. 

Il n’y avait rien. Il y a pourtant toute une carrière qui sort du département du Mono, chaque jour de marché de comè ou de Lokossa. J’ai vu le potentiel de cette filière, c’est tout un chantier à exploiter. C’est pourquoi je me suis consacré à la valorisation de la banane. Et qui parle de valorisation, parle de valeur ajoutée. 

Nous avons donc commencé avec la transformation de la banane plantain bio en farine. 

Et pas seulement le plantain. Nous avons étudié également, les autres variétés de bananes que nous avons proposé en farine.

D’où vient l’idée de la fabrication des mèches écologiques à partir de fibres de banane plantain ?

Vous voyez cet arbre-là, ce plant-là, vous le voyez aussi gigantesque, c’est tout un travail que la nature lui a imposé. C’est un entremêlement de feuilles et on parle de faux troncs. De tout ce que produit cet arbre, on en utilise que le régime qu’on prend. Il fallait réfléchir pour donner de la valeur à tout ce qui est jeté, surtout que nous parlons aujourd’hui de la deuxième vie des déchets. 

De réflexion en réflexion, le projet BBTV de l’Université nationale d’agriculture a entendu nos cris et s’est portée volontaire pour nous appuyer dans notre démarche. Ils ont fait déplacer de la sous-région un expert en transformation des fibres de bananier en accessoires.

Après la formation, on a décidé d’aller au-delà des acquis. On a commencé à traiter les bananiers de sorte à obtenir des fibres. Nous avons expérimenté la production des mèches écologiques. 

Nous sommes passés ensuite à la confection des chapeaux artisanaux, aux objets d’art et beaucoup d’autres choses encore. Il faut dire que la culture de la banane est soumise à des contraintes, dont le vent violent. 

Quand ça passe dans votre champ, les plants ne résistent pas assez. Ce qui constitue, pour nous, un manque à gagner. 

Quelle différence pourrions-nous établir entre les mèches sur le marché et ce que propose votre coopérative ?

La différence entre les mèches plastiques et les mèches écologiques est nette. Les mèches plastiques sont produites avec des composés chimiques de synthèse. Et ce n’est ni bon pour la santé, ni bon pour l’environnement. Dans un passé récent, il n’y avait pas d’alternative. Mais aujourd’hui, notre production a une valeur ajoutée. Les fibres de bananier écologiques peuvent être utilisées pour faire beaucoup de choses dont les mèches et les chapeaux entre autres. 

Certaines femmes disent que quand elles ont porté les mèches écologiques à base de fibres de bananier, elles n’ont pas eu les allergies ou des démangeaisons sur la tête, comme c’est le cas des mèches plastiques. 

C’est vrai que nous travaillons toujours sur le produit. On continue à l’améliorer pour véritablement répondre aux besoins de la grande masse.

Quelles sont les coiffures réalisables avec les mèches écologiques ?

Toutes les coiffures sont réalisables avec nos mèches à base de fibres de bananier. Nous avons des techniciennes et des expertes dans notre groupe qui savent manipuler les mèches. 

Nous avons des professionnels de la sous-région qui sont avec nous. Ces derniers composent les tresses et les coiffures, qui ont obtenu beaucoup de distinction dans la sous-région et même en Occident. 

Quelle est la capacité de production de la coopérative ? 

La capacité de production de notre coopérative s’agrandit par la motivation. On a besoin d’outils performants et de matériels pour produire en grande quantité et en bonne qualité. La production, quant à elle, évolue. Nous produisons les fibres de bananier que nous utilisons pour produire les mèches entre autres. Il y a des vanniers qui sont là, qui sont occupés au travail, il y a des coiffeuses, il y a des tisserands.

Quelle est la prochaine étape de l’expansion des productions de la coopérative ? 

La prochaine étape pour nous, c’est de réaliser un emballage. Ce dispositif qui va répondre véritablement aux besoins de notre production. Nous opterons pour des emballages originaux et qui puissent vraiment permettre de mieux exporter le produit.

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans vos activités ?

Nous avons des difficultés liées au matériel. Il faut des machines pour produire des mèches de qualité et en quantité. Par exemple, lorsque vous prenez des fibres, lorsque ce ne sont pas des machines et que ce sont des outils rudimentaires qu’on utilise, il arrive que les fibres n’aient pas la même taille.

Nous avons besoin de l’électricité, parce que nous manquons de source d’énergie, alors qu’à deux pas de nous, il y a le lycée technique agricole d’Akodéha, qui dispose de courants depuis plus de dix ans. 

On a besoin d’encore plus de communication autour du projet.  

Que le pouvoir public, les PTF, s’intéressent à la chose et puissent porter avec nous. Les Africains, ils attendent que les Occidentaux fassent le travail de valorisation à leur place. Nous avons besoin que nos femmes portent ces mèches et encouragent la production locale. 

Que retenir de votre parcours à ce jour ?

Le parcours de l’entrepreneur béninois est un parcours de combattant. Qui va nourrir votre famille à votre place ? 

Qui va payer les employés alors que votre produit n’est pas encore commercialisé ? Ce produit n’est pas encore sur le grand marché pour vous apporter de revenus fixes. 

Le parcours de l’entrepreneur béninois, c’est un parcours problématique. 

C’est un cri de cœur ! 

J’invite les autorités, j’invite le pouvoir public, j’invite les décideurs, j’invite les PTF à voir, à analyser vraiment quel type d’appui, il faut faire à l’endroit des jeunes entrepreneurs. 

Il y a tellement d’idées à faire valoir. 

Il y a des gens qui ont des idées, de merveilleuses idées, qui commencent à mettre en œuvre, mais parce qu’ils ont faim, parce qu’ils n’ont pas à manger, parce qu’ils n’ont pas d’argent pour payer leurs collaborateurs, ça finit là ! 

Un jour comptable, financier, puis un autre jour, cultivateur.  J’ai laissé mon travail par amour pour la terre, par amour pour l’innovation.  

Je suis animé par une grande passion et c’est mon carburant.

Ecrit par :

Pamela AHITCHEME

Ecrit par

Pamela AHITCHEME

2 Commentaires

  • Aurel

    Très intéressant. Avec des moyens et investissements , on pourrait améliorer la qualité des mèches produites..Là peut-être cette mèche faite à base du bananier pourra rivaliser avec les mèches que les femmes ont l’habitude d’utiliser.

    • C’est tout à fait ce à quoi aspire la coopérative. Vivement que des investisseurs s’intéressent à eux.

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